Un pur moment de bonheur
Dimanche 14h15. La plaine marnaise. Perdu dans les faubourgs de la morne ville de Châlons en Champagne, je fais étape au stade René Saché. L'antre historique de l'ASPTT, que La Poste a dû, faute de moyens, céder à la municipalité, en 2002. L'équipe locale reçoit pour le compte du championnat de DHR la modeste équipe d'Asfeld, village situé à 20 km au nord de Reims. Quelques minutes avant le coup d'envoi, point un premier rayon de soleil. Il faut y voir un signe divin. A mesure que je bavarde avec le gardien du stade, je fais connaissance avec les joueurs de l'équipe première de l'ASPTT. C'est en fait bien simple : il s'agit d'une équipe de moins de 19 ans, encadrée par trois "anciens", évoluant à des postes clé : le milieu défensif. N'empêche. A cet instant je n'imagine pas que ce rayon de soleil était en fait un présage. Que le stade René Saché de "Châlons sur Marne" allait être touché par la grâce l'espace de 90 minutes. La grâce de ces gamins de 19 ans qui évoluent sur un terrain détrempé et boueux comme sur le goudron d'une cour d'école. La technique sûre, le regard haut, l'engagement sans faille... Le soleil s'est caché pour quelques minutes mais dans le brouillard marnais, je distingue trois joueurs époustouflants. Ils n'ont pas 20 ans et constituent la "colonne vertébrale de l'équipe". Steve Ledru est avant-centre. Combattif, trapu, très technique, je serais incapable de désigner son pied de prédilection. Frappes du gauche ou du droit : ce chasseur de buts cadre ses "mines" dans n'importe quelle position... Dans les dernières minutes du match, c'est lui qui sauve l'honneur de son équipe en réduisant le score (1-2) d'une superbe demi-volée en pivot... du pied gauche (en fait je crois qu'il est droitier...). David Garido, le meneur de jeu. Le joueur "facile" qui dribble "utile" et qui joue à une touche de balle dès qu'il en a l'occasion. Déconcertant d'aisance technique et excellent dans la dernière passe... Last but not least. Gautier Rigollet, 19 ans mais capitaine par interim. Libéro. Beckenbauer ou Laurent Blanc feraient figure de branleurs à côté... Le geste juste, l'anticipation, la qualité de relance, la technique, l'intelligence, le placement défensif. En deux mots, LA sérénité. Ce joueur a tout et je ne sais pas si Châlons pourra le garder longtemps. J'espère seulement qu'il ne fera pas la connerie de partir pour jouer à un étage inférieur, ce serait un terrible gâchis... S'il ne joue pas un jour au moins en CFA, je ne comprends rien au football...
Retour sur terre. Le coup de sifflet final retentit dans les travées du stade Saché. L'équipe locale s'incline 2-1 : l'adversaire a marqué, avec beaucoup de réussite, sur ses deux seules occasions de but. La magie a opéré mais partiellement : Châlons ne prend qu'un point, sommum de l'injustice. La pluie se remet à tomber...